SOCIÉTÉ : Quand le chômage des jeunes rime avec l’insécurité à Niamey
L’insécurité à Niamey, la ville capitale du pays, prend des proportions qui préoccupent et inquiètent l’opinion. Il se passe rarement de jour sans que les services de la police nationale ne procèdent à des arrestations des malfrats : trafiquants de drogues, auteurs de vols et ou d’attaques à mains armés, auteurs d’agressions physiques, d’enlèvement voire de meurtres. Que des corps sans vie retrouvés dans les ceintures vertes, que d’agressions physiques signalées tant au centre de la ville quand dans les quartiers périphériques de jour comme de nuit. Le débat fait rage, les avis divergent pour tenter de comprendre ou d’expliquer l’ampleur de cette violence….
M. Nayoussa Djimraou, défenseur des Droits de l’Homme témoigne : « Aujourd’hui, que l’on soit en taxi ou en transport commun ‘’faba-faba’’, on n’est pas en sécurité. Souvent ce sont les chauffeurs de taxi qui agressent les gens (clients) ou sont les complices des agresseurs. Ils te prennent en taxi, circulent avec toi, t’amènent dans des endroits reculés et t’agressent,. Les femmes, ils les violent. Dans une ville aussi grande que Niamey, les magasins ou boutiques sont dévalisés, et ce, en présence des agents de sécurité ».
M. Zoubeirou MAHAMANE, menuisier à Koira Tegui estime : « Avant, c’est seulement à la télévision, que nous voyons des armes ou des gens agresser d’autres à coup de machette ou de couteaux. De nos jours, c’est fréquent à Niamey. Dans certains quartiers comme le nôtre à partir de 20h on ne peut plus s’y rendre ». A Ibrahim NAMAIWA, acteur de la société civile, membre du MPCR de de s’indigner : « C’est inquiétant de nos jours de voir des personnes se promener avec des armes pour s’en prendre à la population. Ils se rendent dans les agences de transfert d’argent, menacent les agents et dévalisent les caisses. Certains se font arrêter, d’autres s’enfuient ».
Mme Rabia DJIBO, de par son expérience en géographie humaine, elle ne trouve pas ce phénomène étonnant. Selon elle, l’urbanisation et l’extension des villes peut expliquer cette insécurité. C’est dire que la violence ou l’insécurité en milieu urbain n’est pas un fait nouveau. Mme Rabia DJIBO Magagi d’ajouter : « Il revient donc à l’Etat d’assurer le maintien de l’ordre, de protéger la population. C’est possible à travers des patrouilles mobiles à tout moment dans les quartiers. De plus, il y a le problème de drogue qui ne rend pas les choses aisées. Ces enfants délinquants sont le plus souvent des drogués, dans chaque quartier il y a des points de vente de ces drogues et alcools; et les gens savent où ils se trouvent ».
Des causes fallacieuses ou objectives de la violence ?
De l’avis de M. Amadou Alio, leader religieux, : « c’est l’intolérance qui peut pousser un individu à ôter la vie à son prochain en ignorant son caractère sacré. Ensuite, il y a l’ignorance. Les jeunes doivent comprendre que les temps des tueries sont révolus et qu’ils doivent se consacrer à la recherche du Savoir. Cherchons le savoir et trouvons des métiers ». « Quand une femme sort, elle se fait arracher son sac à main, quand c’est un homme, il se fait agresser et pareil pour nos jeunes enfants qui font les cours du soir. Cette situation doit interpeller les autorités » a témoigné Seymaou, ménagère au quartier Bobiel.
M. Idi ADAMOU, enseignant : « certains pensent que c’est la pauvreté qui cause de l’insécurité, mais il n’en est de rien. La pauvreté ne donne pas le droit de voler ou d’agresser les gens. Quand on est pauvre on cherche du travail. C’est l’intolérance qui explique cette violence. Une personne tolérante ne peut se permettre de trouver quelqu’un chez lui l’agressera ou lui voler son bien. L’Etat doit trouver un moyen d’y mettre fin ».
Des pistes de solutions au chômage des jeunes
Mme Hadiza Salifou, revendeuse au quartier Lazaret, estime que ce n’est pas seulement le manque d’emplois qui pousse les jeunes à s’en prendre aux gens mais surtout un problème d’éducation. En effet, on ne cesse de demander à l’Etat de prendre ses responsabilités sans se remettre en cause à la fois en tant citoyen ou père, mère, tuteur ayant la charge d’éduquer ou de former un jeune. Aussi, le marché du travail est très promoteur, pense-t-elle, car il existe plusieurs centres des jeunes d’apprentissages de métiers. Dans ce sens, l’enseignement coranique peut aider les enfants à changer de comportement, à mieux les éduquer et à les occuper.
Elh. Idi CHAFIOU, chef de famille, quartier Talladjé : « Tout chef de famille est censé savoir de quoi son enfant est capable en bien ou en mal. La responsabilité d’éduquer les enfants repose sur les parents, mais s’ils échouent l’Etat doit intervenir. A Niamey on voit des enfants autour des décharges publiques, chacun avec des sachets à la bouche entrain de sniffer des stupéfiants. Or à Dakor d’où je viens, ce genre d’enfants sont internés dans un centre approprié où on leur apprend des petits métiers. La ville de Niamey peut s’inspirer de cette expérience. Un enfant qui se drogue, même si on lui donne de l’argent pour gagner sa vie, il ne le fera pas ».
Quelques actions Gouvernement pour lutter contre le chômage des jeunes
En vue de faciliter la formation et l’insertion professionnelle des jeunes, plusieurs actions de renforcement de leurs capacités ont été réalisées. Il s’agit notamment de la mise en place d’une plateforme digitale interactive de collecte, de traitement et d’analyse des données sur l’emploi et la formation professionnelle. Relativement aux actions de renforcement des capacités, dans le cadre de l’inclusion productive des jeunes en milieu rural, 928 groupes de jeunes formés, 26.393 jeunes formés en compétence-vie, 15.943 jeunes formés en micro-entreprenariat et appuyés en capital ou en équipement, 363 coachs villageois identifiés et formés et 1.699 jeunes ont bénéficié des services communaux d’emploi.
De plus, 817 jeunes ont été placés en stage dans des entreprises parmi lesquels 71 femmes, 320 jeunes formés dans le cadre du Contrat de Reconversion Professionnelle (CRP) et 30 promoteurs des agences d’emploi formés. De plus, 51 projets d’entreprise des jeunes ont été mis en place dans le cadre du Programme d’Aide à la Création d’Entreprise (PACE). Par ailleurs, au titre du Recensement Annuel de la Main d’Œuvre (RAMO), 118.517 salariés dont 52.547 femmes ont été recensés au niveau de 7.128 entreprises du secteur privé.
Yahaya Aghali Oullame / NIAMEY-SOIR
(Reportage réalisé avec l’appui de International Média Support)