GOUVERNANCE : La corruption et l’impunité : deux freins à la bonne Gouvernance au Niger


La corruption est un mal qui gangrène la vie politique et économique du Niger. Plusieurs organisations de la société civile (MPCR, M62, TLP, ROTAB), des médias (le Courrier, l’Evènement), des web activistes et blogueurs dénoncent régulièrement la corruption et les actes assimilés à ce fléau. Selon le classement de l’ONG Transparency International, le pays est passé de la 98ème place sur 123 en 2015 à la 123ème sur 179 en 2021. Le rang du Niger en matière de perception de la corruption est 124ème selon l’indice de Transparency international en 2021.

La corruption prend des proportions qui préoccupent l’opinion publique nigérienne car elle a pour impact de priver le pays de ressources nécessaires pour lutter contre la pauvreté, investir dans les programmes sociaux de base visant notamment à réduire les inégalités. « En dépit des appels populaires à la lutte contre la corruption, notre pays continue à régresser en matière de lutte contre la corruption. Les scandales de corruption et de détournement éclatent les uns plus rocambolesques que les autres » a déploré Mme Soumana Sakina, étudiante en Droit Public à l’Université Abdou Moumouni de Niamey.

Au Niger, les causes de la corruption sont en partie politiques et culturelles. D’une part, la société civile dénonce l’ingérence du politique dans le fonctionnement de la Justice et de l’autre la persistance des pratiques sociales courantes assimilées aux actes de corruption notamment «gooro» ou de la cola traditionnelle en guise de reconnaissance ou de remerciement amplifient ce fléau qu’est la corruption à tous les niveaux. En outre, selon les explications de M. Boubacar Hamidou, membre du cadre de concertation des organisations de la société civile, «les lenteurs administratives, la recherche de gains facile, le manque de morale ou d’éthique de certains agents tant du secteur publique que du privé, l’impunité des actes de corruption, sont entre autres causes de la corruption dans notre pays ».

Au plan institutionnel, dans son rapport général de 2021, la Cour des comptes du Niger a souligné plusieurs facteurs voire des actes ou comportements qui favorisent la corruption : « la résistance de certaines personnalités à se soumettre aux lois et règlements en vigueur en matière de déclarations des biens et la mauvaise production des comptes des partis politiques aussi bien pour les comptes annuels que pour les comptes des élections ; la mauvaise gouvernance des entités contrôlées caractérisée, entre autres, par des dysfonctionnements, l’octroi d’avantages indus et l’exécution des opérations irrégulières et/ou sans base légale ; la pandémie de la COVID-19 considérée comme cas de force majeure et ayant servi de prétexte à toutes sortes de violations des dispositions du code des marchés publics et des délégations de service public, telles que la surfacturation, la fausse mise en concurrence et la conclusion de contrats par entente directe sans mise en concurrence alors que les conditions y relatives ne sont pas réunies etc. ».

Quid de la HALCIA et de la Justice ?

Les autorités nigériennes ont pris conscience de la nécessité de lutter contre la corruption en adoptant en 2016 la loi n°2016-44 du 06 décembre 2016 portant création de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA). En dépit des efforts importants qui sont faits par le Gouvernement, de nombreux facteurs freinent le fonctionnement normal des services judiciaires et juridiques au Niger : Le faible maillage territorial des institutions de Judiciaire et l’insuffisance du budget alloué à la justice ( 0.46 % du budget national en 2020), l’absence de digitalisation des données judiciaires et les lenteurs dans le traitement des dossiers, la faible connaissance des services judiciaires et juridiques et le coût élevé de l’accès aux services de justice, la faiblesse de la société civile à promouvoir l’accès à la justice en particulier des victimes de violence, la transition difficile de la gestion des services pénitentiaires, alors que les établissements pénitentiaires ont un taux d’occupation moyen de 141% (allant jusqu’à 341% à Niamey).

Le Gouvernement dans sa lutte contre la corruption

De 2022 à 2021, la lutte contre la corruption a été intensifiée à travers les opérations de contrôle (73 rapports produits) des recettes et des dépenses de l’État, ce qui a permis au gouvernement nigérien de recouvrer plus de 11 milliards. De même, une attention particulière a été accordée à la crédibilité des examens et concours avec plus de 32 supervisions en 2021.

Sakinou Mamane

(Reportage réalisé avec l’appui de International Média Support)