ENTRETIEN : M. SANI Ayouba, Directeur Exécutif de JVE-Niger sur la Justice climatique et l’engagement de la jeunesse nigérienne dans la lutte contre les changements climatiques


 

Dans cet entretien accordé à NIAMEY-SOIR, M. SANI Ayouba, Directeur Exécutif de l’Association des Jeunes Volontaires pour l’Environnement du Niger (JVE-Niger) a principalement partagé avec nous son point de vue sur la Justice climatique et l’engagement de la jeunesse nigérienne dans la lutte contre les changements climatiques

Niamey – Soir (N.S) : Présentez vous à nos lecteurs.

Sani Ayouba (S.A) : Je me nomme SANI Ayouba, Directeur Exécutif de l’Association des Jeunes Volontaires pour l’Environnement du Niger (JVE-Niger).

N.S : Les changements climatiques : Qu’est-ce à dire ?  

S.A : A l’entame de mon propos, permettez – moi de remercier votre média en ligne NIAMEY-SOIR pour cette opportunité qu’il m’accorde de me prononcer sur les changements climatiques. Je profite également pour saluer et encourager votre équipe pour son engagement constant dans le sens d’édifier l’opinion sur les enjeux et les défis complexes liés aux changements climatiques.

Pour répondre à votre question, les changements climatiques désignent les variations des températures et des conditions météorologiques sur le long terme, c’est pourquoi on ne peut pas parler de changement climatique au bout d’un ou deux ans.  Il faut une période étalée sur plus de dix ans voire plus de vingt ans à comparer les paramètres climatiques (la température, les précipitations, la direction, les vitesses du vent…) on essaie de voir ensuite faire l’analyse.  Ces variations peuvent être un phénomène naturel quand bien même que depuis le début du 19ème Siècle, ces variations résultent principalement de l’activité humaine à travers l’effet de serre entendu comme l’utilisation des combustibles forcés tels que le charbon, le pétrole et les gaz.

Aujourd’hui, dans l’atmosphère il y a un trouble de gaz à effet de serre. Cela perturbe, dérègle un peu le climat d’où les conséquences dommageables que nous connaissons. Par exemple, si nous prenons le cas des phénomènes de sècheresse. Avant c’était cyclique (tous les 10 ans), mais ces dernières années c’est devenu un phénomène récurent parce que tous les ans nous découvrons des poches de sécheresse à quelques endroits. On peut également souligner les phénomènes de la perte de la biodiversité animale ou végétale, la fonte des glaciers causée par la chaleur, la dégradation des sols ou les inondations avec tous les problèmes connexes …..toutes ces variations que nous ne connaissons pas s’appellent de manière plus simple : «  changements climatiques ». Dans la région du Sahel, les sècheresses, les crises alimentaires (famines), la raréfaction des eaux, les inondations sont indissociablement liées aux changements climatiques.

N.S : A votre vis quel rôle doit jouer la jeunesse pour lutter contre les changements climatiques ?

S.A : En premier lieu, le rôle de la jeunesse au plan national doit consister à la recherche d’une meilleure compréhension du concept de : « changements climatiques ». Il y a un effort de compréhension à faire d’où l’importance des formations et des sensibilisations pour le renforcement des capacités. Les jeunes doivent approcher et écouter les personnes sur l’évolution du temps ou des phénomènes naturels, les jeunes doivent s’en inspirer, essayer de les comprendre et les analyser.

En second lieu, je pense que le rôle des jeunes doit consister à promouvoir les actions visant à renforcer la résilience des communautés pour faire face aux chocs climatiques à venir car ils sont irréversibles.  Et pour la résilience des communautés face aux changements climatiques, il n’y a que deux solutions possibles  à savoir les actions d’adaptation et les solutions d’atténuation notamment la réduction de l’émission des gaz à effet de serre.

N.S : La jeunesse et la justice climatique: Qu’en pensez-vous?  

S.A : A mon avis les jeunes doivent s’engager dans l’innovation tant au niveau national qu’au plan international pour réclamer ce qu’il est convenu d’appeler : « La justice climatique ». En clair, il s’agit de demander compensation et réparation. Pour comprendre la Justice climatique, il importe de savoir que plusieurs études ont révélé que tous les pays ne sont pas responsables au même niveau par rapport aux changements climatiques.

Il y a des pays industrialisés qui ont emprunté le chemin du développement et qui ont émis beaucoup de gaz à effet de serre. Ils ont une grande part de responsabilité par rapport aux changements climatiques. « La justice climatique » consiste à dire que ces pays industrialisés (pollueurs) doivent payer (réparer – compenser) les pays qui subissent leur pollution. A titre indicatif, l’ensemble du continent africain contribue à – 4% des gaz à effet de serre au plan mondial. Malheureusement, c’est le continent africain qui subit beaucoup plus les conséquences. C’est pour cela que nous invitons les jeunes à réclamer Justice climatique.

N.S : Quelle est votre opinion sur l’engagement de la jeunesse nigérienne dans sa lutte contre les changements climatiques ?

S.A : Il y a 10 ans nous n’avons pas le même engouement de la jeunesse nigérienne sur les questions des changements climatiques. Aujourd’hui, c’est encourageant de voir qu’il y a plus d’une centaine d’organisations des jeunes sur les changements climatiques et qui essayent d’apporter leurs contributions pour renforcer la résilience communautaire, aider à la mise en œuvre des projets en lien avec le développement rural, la préservation de l’environnement.

Cependant, j’estime que ce n’est pas suffisant. Je pense que l’engagement des jeunes y ait mais il manque de l’orientation et il n’est pas ressenti au niveau international. Or, c’est à travers la participation des jeunes au plan international que notre pays pourra mieux se faire entendre sur ces questions. Quand la voix d’un jeune porte loin, il peut orienter les partenaires techniques et financiers tout en donnant plus de visibilité aux actions du pays dans sa lutte contre les changements climatiques. Du reste, le Niger est un laboratoire d’expériences dans ce domaine. Le pays est très connu à travers ses initiatives portées sur la préservation de l’environnement, la lutte contre la désertification et autres problématiques connexes.

N.S : Pour clore cet entretien, quelle appréciation vous faites du partenariat des acteurs étatiques avec les jeunes dans la lutte contre les changements climatiques ?

S.A : Il est important de considérer les jeunes comme des partenaires dans la mise en œuvre des actions de lutte contre les changements climatiques et non comme des bénéficiaires. Quand je parlais tantôt d’implication des jeunes, cela ne se limite pas à les inviter aux réunions, ateliers ou séminaires. Il s’agit plutôt de les faire participer activement aux analyses des politiques publiques afin que leurs points de vue ainsi que leurs préoccupations propres soient prises en compte. Nos jeunes ont des idées novatrices, de la créativité qu’ils peuvent mettre au profit du développement de notre pays pour peu que nos décideurs leur donnent l’opportunité de se faire entendre.

Je vous parle de la jeunesse au sens large car la jeunesse rurale peu ou non alphabétisée n’est pas à ignorer. Pour terminer, j’affirme que cette frange de la jeunesse nigérienne à un point de vue très intéressant par rapport à l’exploitation ou à la gestion de nos ressources naturelles. C’est en cela que l’implication de la jeunesse se veut à la fois inclusive et participative. Je vous remercie.

Propos recueillis par Salamathou Alaké

(Entretien réalisé avec l’appui de International Média Support)