DEMOCRATIE : La persécution des acteurs des médias en Afrique de l’Ouest, un coup dur à la liberté d’expression
(Niamey – Jeudi 10 Novembre 2022) En Afrique de l’Ouest, les hommes de médias sont régulièrement confrontés aux arrestations tous azimuts, menaces et harcèlements en dépit du fait capitale que l’information est un bien public indispensable au fonctionnement normal de la démocratie. Du reste, la liberté d’expression est un droit humain fondamental garanti par les Constitutions dans les différents pays de la sous-région et par les textes fondamentaux internationaux et conventions ratifiées par les différents Etats de l’Afrique de l’Ouest. Malheureusement, la persécution des acteurs des medias en Afrique de l’Ouest est devenue persistance et porte un coup dur à la liberté d’expression.
AfricTivistes, (une Association de Blogueurs œuvrant pour la consolidation de la démocratie en Afrique) a estimé que l’année 2022 est particulièrement sombre pour les journalistes ouest-africains dont les libertés ont été à plusieurs reprises menacées ou restreintes. Selon cette Association les tentatives de musèlement des voix des acteurs des médias sont des signes patents du recul démocratique dans les pays de la région.
Pour illustrer son propos, AfricTivistes a signalé l’arrestation au Sénégal le 6 novembre dernier, du Directeur de publication du site Dakar Matin, pour divulgation d’informations non rendues publiques par l’autorité compétente, de recel de documents administratifs et militaires, entre autres chefs d’accusation. Un autre journaliste sénégalais réputé très critique à l’encontre du régime de Macky Sall, dit avoir été poursuivi le 13 novembre dernier par des individus suspects à bord d’un véhicule 4X4 noir, selon Africtivistes.
La même source fait cas d’un journaliste-blogueur malien victime depuis le 31 octobre 2022 de menaces et harcèlements, après la diffusion d’une enquête intitulée “Ligne Rouge” de la chaîne française BFM TV. Toujours au Mali, la chaîne de télévision Joliba TV News a été suspendue le mercredi 02 novembre 2022 pour deux (2) mois par la Haute Autorité de la communication (HAC) après la diffusion d’un éditorial critique sur la gestion de la transition politique par la junte au pouvoir. En République de Guinée, rien qu’en 2022, l’association “Presse Solidaire” a dénombré le 02 novembre 2022, huit (8) cas d’agressions perpétrées contre les journalistes. En Côte d’Ivoire, le directeur de publication du journal le Panafricain a été placé sous contrôle judiciaire le 5 octobre 2022 après avoir traité l’affaire d’une supposée corruption impliquant un agent des douanes. A cela s’ajoute l’arrestation du directeur de la radio Poufire Fm, pour outrages et diffamation envers des autorités étatiques via les réseaux sociaux.
« Le 19 octobre 2022 au Burkina Faso, le groupe de presse Oméga Médias informait l’opinion avoir reçu plusieurs enregistrements de menaces graves et directes à l’endroit de son personnel et d’une volonté manifeste d’incendier leurs locaux », est-t-il relevé par AfricTivistes. Au Nigeria, poursuit la même source, un journaliste du Premium Times Newspaper, a été arrêté dans l’État d’Ekiti, dans le sud-ouest du Nigeria, alors qu’il effectuait un reportage sur les dernières élections pour le poste de gouverneur de la région. En Guinée Bissau, au mois de février 2022, des hommes armés ont attaqué les locaux de Capital FM, une station de radio privée, jugée très critique à l’égard du régime de Umaro Sissoco Embalo.
Le cas spécifique du Niger …
Au Niger, AfricTivistes a rappelé que le 3 janvier 2022, le Directeur de publication du journal l’Événement et une journaliste indépendante ont été respectivement condamnés à deux mois et un mois de prison avec sursis pour avoir diffusé, en mai 2021, une enquête qui “présentait” le Niger comme un “centre nerveux” du trafic de haschich dans la région. Pour rappel, selon le dernier classement de Reporter Sans Frontière (RSF), le Niger occupe le 59ème rang mondial et reste stable par rapport à l’année 2021.
De l’avis de M. Souleymane Oumarou Brah, Directeur de publication du Journal » La Voix du Peuple », « Juridiquement, on a des textes favorables à la liberté de la presse mais dans la pratique, les journalistes vivent dans une situation déplorable. La situation économique est difficile , de sorte que les conditions de vie et de travail sont très difficiles ». Il ajoute que depuis l’avènement de la COVID, de nombreux journalistes ont été mis en chômage technique, ceux qui sont gardés sont aussi mal payés. Toute fois, précise-t-il, ceci n’est pas une raison pour justifier les manquements aux règles de l’Ethique et à la Déontologie de la presse.
Classement 2022 par RSF du top 10 Pays africains sur la liberté de la presse
Seychelles (13ème mondial) gagne 52 places par rapport à 2021
Afrique du Sud (35ème mondial) perd 3 places par rapport à 2021
Cap-Vert (36ème mondial) perd 9 places par rapport à 2021
Côte d’Ivoire (37ème mondial) gagne 29 places par rapport à 2021
Burkina Faso (41ème mondial) perd 4 places par rapport à 2021
Sierra Leone (46ème mondial) gagne 29 places par rapport à 2021
Gambie (50ème mondial) gagne 35 places par rapport à 2021
Niger (59ème mondial) stable par rapport à 2021
Ghana (60ème mondial) perd 30 places par rapport à 2021
Maurice (64ème mondial) perd 3 places par rapport à 2021
Sakinou Mamane / NIAMEY-SOIR
(Reportage réalisé avec l’appui International Média Support)